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Ca pétille : RIP T3 - Ahmed Au bon endroit au mauvais moment

RIP est un polar poisseux, étonnant et addictif imaginé par Gaet’s, illustré par Julien Monier et publié par petit à petit, maison d’édition dans laquelle le scénariste est également directeur de collection. On peut déjà parler d’ un joli succès populaire et critique pour cette série percutante destinée à un public adulte. 6 volets sont prévus et pour le moment chacun des albums constitue une bonne surprise.

Ce troisième volet intitulé Ahmed Au bon endroit au mauvais moment ne déroge pas à la règle. Il est très attendu et il y a fort à parier qu’il y aura du monde ce week-end à la librairie Bulle pour le lancement de l’ opus qui portera pour l’occasion la marque jaune, sera doté d’une couverture spéciale, d’un frontispice et d’un chapitre additionnel inédit.

Dans cette saga au concept inventif, on découvre le quotidien nauséabond de types qui passent leurs journées au contact des corps en putréfaction de gens qui meurent dans l’indifférence générale. Ils sont à la solde de vautours qui c’est d’usage dans certains pays vident les maisons de leurs dernières richesses pour en tirer le moindre sou avant que les enquêteurs ne fassent leur travail.

On ne connaît pas grand-chose de ces gars seulement qu’ils travaillent en équipe et sous la surveillance constante d’hommes en noir que l’on devine peu recommandables. Même si ce sont des pilleurs, remplis de défauts, on ne peut s’empêcher de s’attacher et de ressentir une certaine empathie à leur égard. Chaque opus possède son personnage principal. Dans le premier volet, on a découvert Derrick, dans le second Maurice, c’est maintenant au tour d’Ahmed d’entrer en scène. C’est un sacré loustic, un médecin légiste zélé, volontiers fouineur qui interprète l’ensemble des éléments pour faire parler les cadavres. Il espère patiemment qu’un jour « il fera mouche ».

Les auteurs nous proposent de faire plus ample connaissance avec ce personnage que l’on avait auparavant entraperçu. Ils nous dévoilent au terme d’ une narration où les scènes défilent à un rythme soutenu un bonhomme en quête de reconnaissance.

Gaet’s s’inspire une nouvelle fois de faits divers collectés ça et là démontrant que parfois la réalité dépasse la fiction. L’habile maître d’œuvre nous propose un puzzle dans lequel les pièces s’imbriquent au fur et à mesure, un schéma narratif diablement efficace et une fois encore convaincant.

L’ancien soigneur animalier distille les indices et nous captive avec une série à tiroirs qui ravira les cinéphiles, mélomanes et autres amateurs de bandes dessinées. Les références pullulent et c’est un plaisir de les débusquer. Il partage avec le lecteur sa passion pour la faune forensique d’où l’omniprésence de mouches et autres insectes peu ragoûtants qui contribuent pour une bonne partie avec le choix de couleurs désaturées aux ambiances macabres de ce thriller.

L’illustrateur Julien Monier excelle avec une imagerie caricaturale et des dessins numériques distordus, peu réalistes qui génèrent d’emblée un décalage tout en complétant avantageusement un récit très sombre. Ses personnages ne passent pas inaperçus car ils ont tous des tronches et des caractéristiques physiques singulières. Maintenant que le cadre est installé, on avance frénétiquement dans une fiction inspirée et saisissante. On ne voit pas passer les 110 pages que l’on dévore à un train d’enfer.

Ce troisième volet est comme les précédents, il est sinistre, austère, délicieusement morbide. C’est un pur régal !

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