Le scénariste est comme toujours parti d’une base historique solide et une fois encore le fond est impeccable, documenté et crédible. L’ ancien enseignant et journaliste a exploité pour ce récit l’ idée machiavélique d’un ingénieux militaire qui consistait à conduire de force des Françaises raflées dans les colonies afin qu’elles y épousent les flibustiers et colons. L’objectif étant qu’ils se sédentarisent, servent les intérêts de la France et renoncent à vendre leurs marchandises en Jamaïque.
Ces femmes au passé flou émanent du peuple, ce sont peut-être des voleuses ou des prostituées. On ne sait pas grand-chose sur elles, seulement qu’elles vivent diversement leur exil forcé. D’abord en mode survie après une traversée difficile, elles vont se révéler au fil des pages. De nouveau, l’auteur distribue des rôles principaux magnifiques aux femmes qui l’émeuvent. Héroïnes d’une saga d’aventures qui s’annonce passionnante, elles ne laisseront personne indifférent, elles sont sublimes, ce sont des battantes et il est rapidement assez net que les hommes ne seront que des seconds couteaux.
Il y a Quitt, l’ambitieuse blonde choisie dès son arrivée par Levasseur, le gouverneur huguenot, Louise, une rousse combative achetée par Toussaint, le quartier maître redouté du Breton et Appoline, la brune qui arrive à destination blessée à mort. Elle est recueillie par Yuma un boucanier, un indien guérisseur qui tentera l’impossible. Bien que leurs ambitions divergent, un pacte les unit et rien ne les arrêtera.
Dans ce premier volet, elles prennent progressivement leurs marques dans une île de la tortue enchanteresse, fraîchement reprise aux Anglais et en proie à de nombreuses convoitises.
L’histoire s’annonce dense et sa mise en cases intéressante.
Après Tomoë, Tieko a été choisi pour illustrer ce nouveau projet. Après quelques repérages avec Google maps, quelques recherches sur les costumes et une révision des us et coutumes de la France de Louis XIII, il s’est lancé dans ce copieux projet avec son approche traditionnelle à la plume et aux pinceaux. Il a profité de cette carte blanche pour tirer le meilleur de sa technique.
Il a d’abord cherché à distinguer les actrices efficacement imaginant des caractéristiques indicatives procédant par petites touches et le rendu est réussi. Ainsi, la frondeuse a des cheveux lisses, la rentre dedans une chevelure en bataille et il a pourvu Apolline d’une coiffure plus classique, un signe peut-être ?
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