C’est une réflexion sur l’inconnu, la solitude mais aussi une splendide invitation au voyage et à la tolérance.
C’est la belle histoire de deux êtres qui se rapprochent en dépit de leurs différences culturelles et physiques. C’est un opus inspiré par l’envie de l’autre, une quête d’enrichissement menée par un narrateur curieux et ouvert qui a laissé entrer dans sa bulle Madame Iriani, une migrante enthousiaste qui a décidé il y a quelques années de quitter son poste de professeur d’université pour vivre pleinement son rêve. Elle a frappé à sa porte et ils ont décidé de partager une belle expérience. Elle lui a confié quelques fragments de vie et il l’a impliquée dans son processus créatif.
C’est donc le fruit d’une alchimie unique, d’une belle collaboration que l’on tient entre les mains.
Il est consacré à un pays que bien peu de de gens connaissent réellement et que l’on sait vaguement placer sur une carte. Le bédéiste qui travaille en bibliothèque en plus d’être un dessinateur passionné nous entraîne à la découverte de sa culture et de son passé. Madame Hibou, c’est ainsi qu’il la surnomme est étonnante, attachante, distraite, sympathique et farfelue. C’est une traductrice enthousiaste et dynamique dont le hobby consiste à partir en train le week-end visiter des villes françaises mais aussi des hauts-lieux culturels.
L’auteur utilise un procédé habile pour faire découvrir une partie du monde qui nous réserve bien des surprises. Il glisse une multitude de références, de nombreuses informations, un contenu dense mais il le fait finement, avec intelligence ce qui est extrêmement plaisant. Il nous sensibilise avec pédagogie et nous embarque complètement. L’illustrateur autodidacte avait une matière abondante mais il a fait le choix de ne conserver que ce qui serait facile à expliquer et comprendre. Ce souci de clarté constant l’a guidé dans la réalisation du livre dessiné. Il transparaît lorsque l’on compulse cet objet qui réussit le tour de force d’être à la fois intéressant et ludique. Bien qu’il possède une jolie carte en fin d’ouvrage, ce n’est en aucun cas un guide exhaustif, encyclopédique et chiant. Il a une ambition respectable qui vise à divertir son lecteur.
Emmanuel Lemaire utilise un traitement graphique au premier abord simpliste et pourtant judicieusement adapté. Il nous enchante avec un découpage assez primaire, des phylactères aux formes basiques que l’on pourrait penser tracés innocemment mais il n’en est rien. Cette combinaison astucieuse et travaillée offre une lisibilité bluffante renforcée par un dessin réaliste très agréable pour l’environnement et par moments un poil caricatural quand il s’agit de représenter les principaux acteurs.
Grâce à cette technique, on a l’impression d’être dans un train et de voir défiler des paysages exécutés avec beaucoup de talent. Ils constituent un personnage à part entière de ce récit. Ce sont des décors ultra-travaillés qui trahissent à peine un titanesque travail de repérage. Par leur intermédiaire, le dépaysement est garanti.
Ma voisine est Indonésienne est un ouvrage léger, délicat et accessible à tous. C’est une madeleine de Proust que l’on savoure avec bonheur dans son canapé à la recherche d’un moment de détente ou d’évasion. L’aventure est poétique et touchante. Elle se poursuit sur Instagram où l’auteur joue divinement les prolongations. Alors, prêts au départ ?