C’est un livre splendide qui épate d’emblée par son aspect élégant, sa couverture classieuse ornée d’enluminures et ses pages de garde éblouissantes et hybrides qui rappellent les tapisseries d’antan et les mémorables pages de Tintin.
C’est une série inspirée du fascinant roman de Pierre Choderlos de Laclos Les liaisons dangereuses, une comédie d’aventure historique dans laquelle le scénariste a malicieusement fusionné deux univers, la France du XVIII -ème siècle et l’Amérique du Nord à l’époque où la France et l’Angleterre s’affrontaient.
Les auteurs nous proposent de suivre les péripéties d’un infame libertin sans scrupules, un sale type, pervers, narcissique et malfaisant dont on aurait trouvé le courrier dans un secrétaire, un personnage odieux auquel on s’attache inévitablement.
C’est cette correspondance épistolaire qui sert de toile de fond à une saga qui laisse transparaître un travail de documentation colossal. Les créateurs qui ont également puisé dans la littérature, le cinéma donnent vie à un récit extrêmement crédible, qui respire l’authenticité.
Avec ce volet introductif épais intitulé L’ennemi du genre humain, les bédéistes imposent une charte graphique claire tout en nous proposant déjà pas mal de péripéties, une histoire à la fois ludique, dynamique où se côtoient suspense, émotion, érotisme et humour.
La construction déroutante en deux parties nettement séparées nous bouscule d’abord mais après le nécessaire prologue on embarque ensuite pour d’excitants épisodes.
Le scénariste a conçu une narration ingénieuse qui offre des points de vue variés et une dimension psychologique délicieuse. Bien que la bd soit assez bavarde, il est parvenu grâce à un découpage redoutable à éviter monotonie et redondance. Une place de choix est réservée au joli dessin de Richard Guérineau. L’artiste qui prouve une fois de plus qu’il est à l’aise peu importe la thématique ou l’époque nous livre des décors sublimes et une galerie de personnages impressionnante (souvent avec des perruques) qu’il anime avec brio.
Son dessin traditionnel, son encrage puissant, son travail sur les niveaux de gris, sa colorisation numérique subtile et l’alternance judicieuse de couleurs chatoyantes apportent un souffle épique, des ambiances renouvelées qui nous saisissent.
Les illustrations complètent avantageusement le texte. Généreuses et immersives, elles trahissent l’énergie dépensée et la maîtrise d’une grammaire impeccable.
Avec cet opus liminaire au charme irrésistible, les bédéistes parviennent à aborder les préoccupations contemporaines par le prisme du 18°siècle. L’entrée en matière est captivante et le rendu d’une qualité de très haute volée.
Laissez-vous tenter, en plus d’acquérir un livre somptueux et raffiné, vous vivrez un voyage dans le temps et l’espace à la fois divertissant et exaltant.
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