En lisant successivement chacun des trois volets parus à ce jour, on peut admirer le savoir-faire des auteurs qui parviennent à nous tenir en haleine avec des albums habilement structurés, cohérents et captivants. Mais également et surtout à élever le niveau au fil des épisodes.

Après nous avoir conquis avec L’envoyé spécial le tome 65 de la série Les Tuniques bleues que l’on ne présente plus, le tandem BeKa et Munuera s’est reconstitué chez le même éditeur pour nous proposer une saga remarquable, un projet innovant, bien mené et riche de nombreuses qualités.

Cette fable rétrofuturiste où les humains vivent entourés de robots à leur service est à la fois prenante et réjouissante. Elle a pour cadre un état du sud des États-Unis uchronique et fascinant.

Elle traite de sujets universels et intemporels que sont l’amour, l’ouverture aux autres, le respect de la différence, les apparences qu’il faut dépasser et la vengeance . Elle contient également une subtile réflexion sur le processus créatif et on pourra même y retrouver des thématiques plus contemporaines et furieusement d’actualité comme une certaine crainte du grand remplacement, qui prête forcément à sourire.

Si le premier acte introduit un univers intrigant et complexe, il nous hameçonne efficacement. Ce titre fut un solide prétendant pour le prix de la meilleure BD jeunesse décerné en 2022 par l’ACBD ce qui est assez logique. Chaque épisode contient une héroïne attachante et combative, de nombreux personnages secondaires et notamment les terribles limiers, des êtres terrifiants et insaisissables.

Il y a également de la poésie, des références multiples à la littérature classique, de la malice et du romantisme.

Les bédéistes imaginent des aventures équilibrées où les ressorts dramatiques sont judicieusement distillés. Il y a de l’action, des scènes cruelles, impitoyables puis d’autres propices à la contemplation et à l’évasion.

Avec les BeKa, on passe par toutes les émotions et on évolue dans des intrigues qui nous désarçonnent. Ils s’adressent à un large public avec plusieurs niveaux de lecture.

La mise en cases de José Luis Munuera est magistrale. On y retrouve la folie et le génie d’un artiste au sommet de son art. Il nous embarque grâce à des compositions inspirées, rafraîchissantes qui font de cette fresque un divertissement irrésistible. Les traits des protagonistes mécaniques et organiques sont toujours soignés et les caractéristiques astucieusement brossées.

Le dessinateur livre de sublimes images, un dessin dynamique, facétieux, expressif et des décors élégants. Avec son complice de toujours, le coloriste Sedyas, il apporte une patine vintage à la fois délicate et savoureuse. L’alternance permanente entre planches en Noir et Blanc puis colorées, les différents effets avec trame ou sans constituent des artifices qui nous charment complètement.

Les cœurs de ferraille, ce sont des enquêtes frissonnantes et passionnantes qui méritent le détour. Elles s’achèvent pour le moment sur un troisième volume époustouflant, une histoire d’amour hors normes, palpitante et touchante. C’est une lecture agréable, une mécanique bien huilée, un concept séduisant à découvrir absolument.

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