Les contes noirs du chien de la casse c’est le titre original d’une BD petit format de 72 pages qui interpelle, bouscule, prend aux tripes et fait réfléchir.
C’est un roman sombre édité par Des ronds dans l’O. Il est scénarisé et dessiné par Remedium un jeune homme engagé issu de la banlieue, un professeur des écoles investi qui a enseigné pendant 12 ans dans le 93.
C’est ce cadre qu’il connaît parfaitement qu’il a retenu pour son récit, un quartier en désespérance sociale, un lieu où se concentrent les HLM et où subsistent des parents dans des situations compliquées et par extension de nombreux enfants. Ils subissent de plein fouet les effets de la ghettoïsation et sont durement impactés par le fatalisme ambiant.
Il nous propose 7 histoires qui reprennent toutes des itinéraires d’adolescents qu’il a croisés de près ou d’un peu plus loin. Il illustre leur quotidien ce qui lui permet d’aborder avec finesse des thèmes délicats: l’engrenage facile vers la délinquance, la place des femmes, l’image dégradée des banlieusards, la religion, la violence ou encore les relations tendues avec les forces de l’ordre.
Dès la couverture, on ressent fortement le choix qui s’offre à ces jeunes, cette dualité permanente entre un déterminisme facile, l’illégalité et de l’autre côté le recours au libre arbitre et au savoir, unique rempart contre le mektoub.
Avec son texte travaillé et un style littéraire très agréable Remedium nous immerge avec talent au coeur de la cité. Son choix du noir et blanc renforce le sentiment de malaise général et son dessin épuré, sans détails ni décors accompagne les mots avec sobriété.
Les histoires parlent d’elles-mêmes, le dessinateur s’appliquant à mettre en scène des acteurs expressifs.
L’album souligne avec efficacité l’échec des politiques qui ont été menées en matière de logement et leurs répercussions désastreuses. Il permet d’alimenter un débat, une réflexion à laquelle on ne pourra durablement se soustraire.
C’est avec brio que son auteur fait mouche et apporte sa pierre à l’édifice en prouvant que l’on peut s’en sortir pourvu que l’on s’en donne la peine et que l’on soit combatif.
Il signe avec cet opus un pamphlet militant, touchant et prenant qu’il faut lire absolument.
Bonne lecture.
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