Il signe un livre dans lequel il raconte une amitié singulière, une histoire touchante qui le marqua fortement. Pour cela, il a fallu trouver le bon angle, la bonne distance et accepter de se raconter.
Pour ce récit très abouti, le bédéiste Castelroussin a mis ses tripes sur la table, accompli un gros travail sur soi et livré quelques moments déterminants, des instants gravés qui feront de lui celui qu’il est aujourd’hui, un auteur engagé, généreux, fidèle, entier, sensible, et attentif aux autres.
Dans une narration feuilletonesque, remplie d’amour et de nostalgie, il raconte son frère de cœur, Cyril, leurs centres d’intérêt communs puis le long combat de ce dernier contre la maladie. C’est un magnifique hommage qu’il rend à un être bienveillant et solaire qui a compté pour lui, un alter ego avec une personnalité différente de la sienne auquel il doit l’une des rencontres déterminantes de son existence et sans doute une passion pour la musique (ils ont joué de longues années ensemble) qu’il dévoile simultanément avec un excitant projet musical intitulé The Troubles. Avec sincérité, il raconte sa connexion unique avec celui qui le fera évoluer, avancer et se dépasser.
L’émotion est au cœur du livre dessiné. Le lecteur est le témoin d’une lente descente aux enfers, il appréhende facilement le vide sidéral laissé par la disparition de ce camarade.
Le créateur utilise des images fortes et puissantes qui interpellent et captent efficacement notre attention. Si la musique est omniprésente, l’attirance de Laurent Astier pour les super-héros transpire largement par le bais des nombreuses représentations, des couvertures alternatives de comics présentes notamment en fin d’ouvrage.
Dans cet opus savoureux, il multiplie les découpages ingénieux et inventifs qui sont un peu sa marque de fabrique. Une fois de plus, ça fonctionne parfaitement, il nous balade avec aisance d’une case à l’autre d’autant que la lecture est facilitée par une alternance des couleurs judicieuse et agréable, une mise en couleur sobre, nullement naturaliste, qui met parfaitement en valeur son dessin élégant et précis.
La force de vivre c’est également un objet superbe avec un dos toilé bleuté classieux confectionné avec soin par Rue de Sèvres, un éditeur qui sait mettre en valeur ses collaborateurs.
Avec ce coup d’œil dans le rétro nécessaire, l’artiste donne vie à un album universel, sensible et prenant, qui sonne un peu comme un rite de passage, un devoir moral mais aussi un livre exutoire, cathartique et libérateur qui laisse une excellente impression.
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