Cette saga démontre, si on en doutait, que les séries au long cours ont encore un bel avenir. Nous sommes en effet nombreux à attendre la suite d’une œuvre devenue incontournable et addictive.
Les lecteurs ont eu des frayeurs en apprenant le départ d’Enrico Marini, dessinateur et coloriste fabuleux qui a su durablement marquer la série de son empreinte. Avant de partir pour d’autres projets il semble avoir pris le temps de choisir son successeur et quand on voit le résultat, on ne peut que lui donner raison.
Stephen Desberg et son éditeur ont négocié avec habileté un virage délicat et ils s’en sortent avec les honneurs.
Pour ce troisième cycle, il a transporté son héros en Orient. Il nous mène en Egypte, au Caire, à la découverte d’une civilisation qui fascine et séduit. Il nous propose de suivre le trafiquant de reliques saintes et son associée sur les traces du pharaon Akhenaton. Ensemble, ils entreprennent une chasse aux vestiges haletante.
Le bédéiste organise le retour à la vie d’un héros qui a connu de sérieux revers et se pose davantage de questions mais dans ce volet, il retrouve ses capacités et redevient celui que l’on aimait tant, un esprit libre, cultivé, une fine lame et un enquêteur chevronné.
Il s’est lancé un défi, retrouver l’enfant mystérieusement disparu qu’il a eu avec la sulfureuse empoisonneuse et dont il a appris récemment l’existence. On pressent d’emblée qu’il est déterminé et on sait que rien ne l’arrêtera.
Le créateur belge met au centre du récit la relation tumultueuse entre deux personnages aussi dangereux qu’attachants. Il ne s’y est pas trompé, Armando Catalano et la belle Mejaï sont des acteurs romantiques au potentiel incroyable, ils ont été finement construits et il est assez perceptible qu’il prend du plaisir à les faire évoluer.
Leurs retrouvailles sont toujours l’occasion de scènes émouvantes, des temps forts indispensables pour exciter la curiosité des fidèles de la première heure.
Ce nouveau cycle est également marqué par l’entrée en scène de protagonistes intrigants. La splendide Sabbatéenne, conseillère du Sultan, ne laissera personne indifférent. Elle est dotée d’un magnétisme fou, d’un charme et d’une assurance troublante.
Avec cet épisode comme avec le précédent, Luigi Critone prouve que le Scorpion est entré dans une nouvelle ère.
Le temps n’a aucun impact sur lui, il est toujours cet explorateur intrépide et savant mis en cases par des illustrateurs talentueux. Ils rivalisent d’artifices pour sublimer une épopée inspirée et rythmée.
Avec ce nouveau dessinateur, on en prend plein les yeux du début à la fin. Rien ne semble lui résister. Il signe des décors orientalistes somptueux, des personnages secondaires singuliers et un découpage judicieux qui apporte du souffle et de l’élan à un épisode qui comporte des pauses propices à la contemplation. Son dessin réaliste est précis et élégant. Quant au rendu final, il est clairement moins lisse, il respire l’exercice, la sueur et l’exigence.
Luigi Critone est un faiseur d’ambiances hors pair qui nous bluffe grâce à ses jeux de lumière, sa maîtrise de la couleur directe et de l’aquarelle dont il parvient à tirer des nuances éblouissantes.
La tombe d’un dieu est un album qui respecte le cahier des charges, on y retrouve un script bien ficelé, solidement ancré dans l’histoire, une bonne dose de suspense et une prestation graphique qui devrait contenter et fédérer les bédéphilies les plus pointilleux.
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