C’est un opus qui devrait ravir ceux qui avaient apprécié Maria et Salazar de Robin Walter chez Des ronds dans l’O.
C’est un récit qui met en lumière le départ d’une population, majoritairement des hommes, mais aussi des femmes dans les années 70 à destination d’un état en pleine croissance, ravi de profiter d’une main d’œuvre providentielle, jeune, énergique et surtout peu coûteuse. C’est également un livre dessiné généreux et complet qui met en perspective les évolutions de notre pays en matière de politique migratoire.
L’auteur décrit parfaitement les conditions d’arrivée, le logement dans les baraquements, ainsi que l’emploi massif et l’exploitation sur les chantiers en qualité de maçon de ces arrivants qui seront finalement remplacés quelques années plus tard par des travailleurs moins onéreux en provenance d’autres horizons.
Par le biais d’une voix off, le bédéiste nous décrit le contexte international et notamment les transformations qui se produisent au Portugal sous la dictature puis après et dont les répercussions se font évidemment ressentir dans les pays d‘accueil. Il expose avec intelligence et pédagogie les mutations d’un état qui deviendra progressivement une république de type semi-présidentiel. Les explications sont claires et les dialogues ciselés et justes.
Il nous présente deux garçons vaillants, Mario et Nel. Bien que motivés et remplis d’espoir, ils vont être confrontés à une dure réalité. Si le premier acceptera de se conformer aux règles fixées, le second se montrera moins docile, plus intrépide quitte à prendre tous les risques pour réussir.
Pour cette fresque émouvante et passionnante, le scénariste a puisé dans ses souvenirs, dans les histoires rapportées par son paternel. C’est pourquoi « Les Portugais » respire autant le vécu.
Le lecteur perçoit assez vite le côté témoignage, l’aspect solennel et authentique d’une narration addictive et prenante.
Le dessinateur Chico apporte du souffle, de l’élan avec des illustrations épurées, légères au rendu ultradynamique.
Il a conçu un découpage qui impose du rythme. Il multiplie les effets, il y a une alternance réfléchie et savoureuse entre un gaufrier classique, des pleines pages, doubles pages ou encore des cases détourées vivifiantes.
Les couleurs d’Emilie Rouge donnent de la consistance et de la douceur.
Les Portugais, c’est une bande dessinée qui mérite pleinement sa place en finale pour le prix BD d’histoire contemporaine.
A la fois instructive, riche et touchante, elle rappelle judicieusement la difficulté de l’exil, les sacrifices consentis et le courage nécessaire pour accepter où que l’on soit de tout reprendre à zéro.
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