Elle met en scène des personnages pittoresques, des acteurs charismatiques, entiers et touchants comme on les trouve dans les films d’Audiard. Ils sont tous patiemment et subtilement sculptés. Il y a d’abord Monsieur Jules, un proxénète à l’ancienne au regard dur puis ses deux tapineuses Solange et Brigitte. Si la première semble épanouie et généreuse, la seconde est acariâtre et frustrée.
Ils forment une petite communauté qui a ses habitudes.
Après avoir collaboré avec Zidrou et Laurent Galandon, Arno Monin cherchait à explorer des zones plus sombres et c’est le script d’Aurélien Ducoudray avec qui il projetait de collaborer depuis longtemps qui lui a offert cette opportunité.
Après l’Adoption, il cherchait à sortir de sa zone de confort en abordant un sujet plus dur, il a donc été immédiatement enthousiasmé.
Jouissant de la confiance de son scénariste, il s’est accaparé un script malléable. Il a glissé ses influences cinématographiques, sa sensibilité pour mettre en cases une histoire désabusée.
Il est parvenu à mettre en forme pour ce huis clos intense un espace bien construit, esthétiquement riche qui fonctionne à merveille. On sent que chaque déplacement est y pensé et cohérent. Comme toujours avec le nantais, les émotions transpirent intuitivement.
Son dessin laborieux, très abouti donne vie à des personnages expressifs aux caractères singuliers.
Avec des couleurs numériques et un effet brosse aquarelle, il offre un joli rendu mais c’est surtout son travail inspiré et pertinent sur les ombres et les silhouettes qui contribue à une haletante mise en tension et nous embarque complètement.
Monsieur Jules est un homme d’un autre temps, un bonhomme charismatique, dépassé mais lucide et attachant.
Le tandem nous entraîne dans un univers ou les règles de fonctionnement évoluent à toute vitesse, un monde impitoyable et cruel où tout peut rapidement déraper.
Ils signent un récit fictionnel à fort potentiel, un joli one shot qui qui pourrait devenir un très grand film.
Ecoutez la Chronique :